5/13/2025
Logement abordable dans l’OCDE : leviers et politiques pour un avenir meilleur
Cet article examine les défis de l’accessibilité financière du logement dans les pays de l’OCDE et l’impact de la crise de la COVID-19 sur la précarité résidentielle. Il propose un panorama d’instruments publics (investissement social, réformes du zonage, ciblage des aides, régulation locative) pour construire un avenir plus équitable et durable.
Table of Contents
Logement abordable dans l’OCDE : leviers et politiques pour un avenir meilleur
Introduction
L’accessibilité financière du logement se définit comme la capacité des ménages à louer ou acquérir un logement décent sans compromettre leur pouvoir d’achat pour les besoins essentiels. Pourtant, dans la zone OCDE, moins de la moitié des habitants se disent satisfaits du coût du logement dans leur région. Cette situation touche particulièrement les locataires à faible revenu, les jeunes adultes et la classe moyenne, qui consacre une part toujours croissante de son budget à l’habitat.
Dans cet article, nous examinons d’abord les défis structurels qui limitent l’offre de logements abordables, puis l’impact de la crise de la COVID-19 sur la précarité résidentielle. Enfin, nous passons en revue un ensemble d’instruments publics – de l’investissement dans le logement social à la régulation du marché locatif – et proposons des pistes pour construire un avenir plus équitable et durable.
1. Les défis structurels de l’accessibilité financière
1.1 Des coûts de logement en hausse continue
Au cours des deux dernières décennies, les prix de l’immobilier ont augmenté dans plus de 30 pays de l’OCDE, parfois de plus de 80 % (Canada, Suède, Israël). Les loyers ont suivi une trajectoire similaire, plus que doublant dans certains pays (Turquie, Lituanie, Islande). Cette flambée des coûts se traduit par une part de plus en plus importante du budget des ménages consacrée au logement : entre 2005 et 2015, cette part a progressé de près de 5 points de pourcentage dans vingt pays de l’OCDE.
1.2 Groupes vulnérables et disparités territoriales
Les ménages à faible revenu sont les plus exposés : un tiers des locataires du quintile inférieur consacre plus de 40 % de son revenu au logement et souffre souvent d’un double handicap : charges financières élevées et logements de moindre qualité. Les jeunes adultes, faiblement ancrés sur le marché du travail, sont de plus en plus nombreux à vivre chez leurs parents ou à payer des loyers écrasants sans pouvoir compter sur un apport familial suffisant. Dans les aires urbaines dynamiques, la demande excédentaire creuse les difficultés d’accès, renforçant la ségrégation socio-spatiale.
1.3 Baisse de l’investissement public et rigidités réglementaires
Malgré un besoin criant de logements abordables, l’investissement public direct dans la construction a été divisé par deux depuis 2001, passant de 0,17 % du PIB à moins de 0,07 %. Parallèlement, les coûts de construction, portés par des règles énergétiques et environnementales plus exigeantes, ont augmenté de plus de 70 % en vingt ans dans la zone OCDE-UE. Les réglementations d’urbanisme trop contraignantes, la rareté des terrains et les procédures d’autorisation lourdes contribuent à restreindre l’offre, creusant le fossé entre l’offre et la demande.
2. L’effet de la COVID-19 sur la précarité de logement
2.1 Aggravation des inégalités
La crise sanitaire a mis en lumière les écarts de qualité et de surface des logements. En France, les personnes disposant de moins de 18 m² par personne étaient plus exposées à la contamination et souffraient davantage du confinement. En Angleterre et au Pays de Galles, le surpeuplement a été corrélé à une augmentation des décès liés à la COVID-19. Les ménages déjà fragilisés – jeunes, locataires précaires, plus bas revenus – ont subi des pertes de revenus plus marquées et ont eu plus de mal à assurer leurs loyers ou remboursements hypothécaires.
2.2 Filet social et mesures d’urgence
Face à la pandémie, plusieurs pays ont adopté des moratoires sur les expulsions et la suspension des crédits immobiliers, tandis que des aides ciblées ont permis aux locataires de reporter leurs factures et aux sans-abri d’accéder à des hébergements d’urgence. Si ces mesures ont limité l’explosion des expulsions à court terme, leur prolongation doit être calibrée pour éviter un endettement massif. Le recours à des programmes locaux, souvent insuffisamment financés, révèle la nécessité d’un dispositif intégré et pérenne.
3. Mesurer l’accessibilité : vers une approche multi-indicateurs
Pour orienter efficacement les politiques, il est indispensable de combiner plusieurs indicateurs :
- Ratios prix/revenu et charge de loyer : fournissent une vision agrégée de la tendance des coûts, mais ne distinguent pas l’impact selon les ménages.
- Indicateurs de revenu résiduel : évaluent le pouvoir d’achat restant après paiement du logement, mesurant la capacité à couvrir les autres dépenses essentielles.
- Indicateurs de qualité du logement : suroccupation, défauts d’entretien, absence d’installations de base ; essentiels pour comprendre l’état sanitaire et environnemental du parc.
- Indicateurs subjectifs : enquêtes sur le ressenti et la satisfaction des ménages, qui éclairent les préférences et la tolérance aux dépenses élevées lorsque la qualité est jugée satisfaisante.
La complémentarité de ces outils offre une vision holistique. Des tableaux de bord locaux, alimentés en temps réel, peuvent ainsi orienter la répartition des moyens publics vers les territoires et les profils de ménages les plus exposés.
4. Panorama des instruments publics pour une meilleure abordabilité
4.1 Stimuler l’offre de logements sociaux et abordables
Le logement social représente moins de 10 % du parc dans la majorité des pays de l’OCDE, mais dépasse 20 % en Autriche, au Danemark et aux Pays-Bas. Des initiatives comme le Big Housing Build en Australie (6 milliards AUD pour 12 000 logements) ou le Rapid Housing Initiative au Canada (1 milliard CAD pour la création rapide d’unités abordables) montrent que des investissements massifs relancent la construction, génèrent des emplois et fournissent un habitat durable. En Europe, le plan France Relance consacre près de 3 milliards d’euros à la rénovation énergétique et à la densification du parc existant.
4.2 Réduire les obstacles réglementaires
La simplification des procédures de permis de construire, la réforme du zonage – comme la levée du monopole de la maison individuelle à Minneapolis (États-Unis) – et la reconversion accélérée des friches industrielles sont des leviers clés pour augmenter l’offre rapidement. La flexibilité métropolitaine, alliée à des garanties de qualité, offre un terrain favorable à la densification responsable.
4.3 Cibler les aides à la demande
Les allocations logement et les subventions à la rénovation ou à l’accession doivent être concentrées sur les ménages à faibles ressources. Des plafonds de revenus, couplés à un contrôle régulier de l’éligibilité, permettent d’éviter la dilution des aides. En parallèle, la suppression progressive des allègements fiscaux régressifs (déductibilité des intérêts, exonérations sur plus-values) garantit une meilleure redistribution et libère des financements.
4.4 Réguler le marché locatif privé avec nuance
L’encadrement des loyers – plafonnement progressif des augmentations ou stabilisation annuelle – protège les locataires sans tarir l’investissement locatif si la réglementation exclut les logements rénovés ou certifiés « verts ». Des études montrent que la stabilisation nuancée, appliquée de manière homogène, limite la gentrification et les expulsions tout en préservant l’offre future.
5. Recommandations pour un avenir résilient et inclusif
- Renforcer l’investissement dans le logement social : faire du logement abordable un moteur de la relance verte et solidaire.
- Moderniser les politiques d’urbanisme : favoriser la densification, la mixité et la diversité de l’offre.
- Améliorer le ciblage des aides : concentrer les subsides sur les plus vulnérables et réduire les avantages fiscaux injustifiés.
- Encourager des modèles innovants : propriétés partagées, baux à loyers encadrés et copropriétés éthiques.
- Anticiper la demande future : intégrer l’impact du télétravail, l’essor des zones périurbaines et les besoins des seniors.
- Déployer des systèmes de suivi : observatoires locaux et mesures en temps réel pour ajuster en continu les politiques.
Conclusion
Les enjeux liés au logement abordable dans les pays de l’OCDE sont majeurs et complexes : hausse des coûts, précarité accrue, chaîne de valeur sous pression. La crise de la COVID-19 a amplifié ces défis mais a aussi fait émerger des réponses rapides. Seule une politique coordonnée, alliant investissements massifs, réformes structurelles et ciblage rigoureux, permettra de garantir à tous un logement décent et abordable. L’avenir repose sur notre capacité à innover, mesurer précisément les besoins et agir localement tout en pensant global.
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